Le tonneau des Danaïdes d'internet
Se prête idéalement au déversement du pulsionnel
Tout de noir . Un mainate , un mainate religieux . Il bouge étrangement - des ficelles invisibles le transformant en marionnette de téléévangéliste - c'est Nick Cave . C'est sombre et c'est lumière -
contraste - sentir la joie quand il n'y a plus rien . J'ai toujours trouvé les Leçons des Ténèbres version Couperin ou de Lalande infiniment revigorantes .
Ce rituel étrange des foules par milliers dans des champs ou des stades . Ils viennent chercher une parcelle d'émotion , de présence , d'existant . Ils viennent chercher un morceau de la vraie croix - de la leur . Nick Cave seul avec son piano - il nous emporte sur ses ailes - loin , loin très loin . Il y a le jeu - le jeu perçu - et ses règles . Ce n'est pas que l'artiste soit plus freak que le pékin moyen - c'est juste qu'il est visible et catalyseur .
Là oui là juste sa voix - sa voix en skyline avec des notes jouées sur des touches noires et blanches
Et rien d'autre
Dans les grandes moyennes ou petites villes il est assez courant de croiser un panneau publicitaire
Entreprise ***** - Taxis Ambulances Pompes funèbres suivi d'un numéro de téléphone
C'est à l'échelle du transport une chaîne de valeur intégrée
Quand ils sont ensemble dans la joie et la bonne humeur - chauffeurs et passagers entonnent la fameuse chanson
- Ça va ? Ça va ? ( en choeur )
- Ça va ! Ça va ! ( en choeur )
- On y va . On y va ( choeur )
- Ça va ? Ça va ? ( en choeur )
- Ça va pas trop . Ça va pas trop ( en choeur )
- On y va . On y va ( en choeur )
- Ça va ? Ça va ? ( solo )
- Ça va plus du tout . Ça va plus du tout ( solo )
- On y va . On y va ( solo )
Le romanesque est à charge constante
C'est juste qu'il change de formes
L'hyperbole du politique se noyant en lui même ou le chevaleresque terminant en boucherie en étaient des représentations
Le feuilletonisme du monde en est une autre
Du tertre il embrasse du regard la plaine . A perte de vue ils tournent . Certains on dirait des pâles d'éoliennes brassant l'air en lourds battements . D'autres à la façon des moulins de prières tibétains avec leurs bruits de bois s'entrechoquant clac-clac clac-clac clac-clac . Ah ! Ceux là au loin il les reconnait ils attendent le vent pour gonfler et démarrer les grincements de la mécanique . Il y en a qui tournent à une allure folle , inimaginable de vraies turbines - ils n'existaient pas avant . Tout cela est sidérant des milliers , peut-être des milliers de milliers
Interloqué il se retourne vers son fidèle compagnon
- C'est donc cela Sancho ?
- Oui maintenant oui
Contempler pendant des heures la surface et imaginer les profondeurs - en tout homme un pêcheur . Bouger la gaule en tous sens - avec précision . Explorer où peuvent se nicher les carnassiers . Imaginer en-dessous puis décider de peindre le dessus - avec précision aussi - à la miniaturiste .
Le tapis roulant du temps et ses surprises . Il est possible qu'Albert Drachkovitch-Thomas soit tombé d'une faille spatio-temporelle où il était en compagnie des Brueghel . Il a rajouté Thomas en rallonge à son nom en hommage à sa grand-mère maternelle . Arrêt sur images - tout est figé - on cherche le vif , il est logique qu'il est perfectionné une technique de pêche - celle du mort manié . Une monture célèbre qu'il a élaboré porte son nom .
Il incarne une continuité et une longévité - il n'est pas loin du siècle actuellement . Les yeux grands ouverts pour nous restituer cette vision que nous avions oublié - en superposition . L'attente , le désir - qu'est-ce qui va mordre ? Après tout pinceaux ou cannes - les mains toujours pleines - une certaine idée du bonheur
- en photos cette très belle réalisation éditée par Byblos en 1987 , elle est dédicacée -
Des milliers de traits pas un à enlever ou à rajouter . Faire apparaitre sur le papier ce qui est regardé . Il y a chez Aymar de Lézardière la justesse incarnée . Une oeuvre se mariant parfaitement avec les écrits de Maurice Bedel , Jean de la Varende , Jules Michelet ou Jean Giono . Une oeuvre où son noir et blanc laisse place aux imprimés et au silence . Il existe quelques rares dessins colorisés - on dirait des néons suspendus dans une église romane
Des lièvres , des chiens , des vaches et beaucoup d'oiseaux dans ces pays de terre et d'eau . Quelques hommes aussi mais rarement - ils sont les seuls à être dessinés de façon malhabile - tels des ratures . Pourtant ils sont omniprésents c'est eux génération après génération qui ont fait naître ces paysages . Planter les arbres et lever les digues , des barques rappellent qu'ils ne sont pas bien loin . Il a préféré d'autres trognes . Il a dessiné aussi des châteaux , des villages , des églises - tout ce bâti en pierres - semble faire corps avec la nature . Comme momentanément érigé en son milieu .
Se poser , regarder longuement - rien , rien si ce n'est la contemplation et le silence et il faut bien le dire - la beauté . Peu d'hommage autour d'Aymar de Lézardière un livre paru à l'occasion d'une exposition du musée de la Chasse et de la Nature en 2009 écrit par Xavier Patier . Il a le sens de la formule et le mérite de faire partie de cette confrérie secrète d'admirateurs . En bémol c'est qu'il le tire du côté vieille France - il veut le poser sur le socle . Identique pour ce remarquable geste d'une tentative de catalogue raisonnée qui veut lui faire assignation là où il n'y a que juxtapositions . Dommage depuis plus rien , alors prendre un caillou le lancer loin très loin . Un grand plouf , pour sur qu'il aurait aimé et dessiné ces ondes . Recommencer en pensant à lui
C'était une prose infusée chargée à la gothique tendance Viollet-le-Duc
Il y a parfois ce mode ou un autre
Raconter des histoires toujours
Après tout la première qu'on se raconte au réveil c'est celle de soi
Pour l'opération il s'était efforcé de prendre en compte tous les paramètres . Il avait choisi un de ces week-end de fin d'année où la marée humaine submerge les grands boulevards . La foule coule et ses flots viennent lécher les vitrines . Cette période de noirceur où les phalène sont attirés par les lamparos .
Se poser au milieu du trottoir , campé sur un récipient qui fasse que sa tête dépasse juste des autres . En souriant il pense - une caisse à savons . Rester figé telles ces statues humaines devant Beaubourg ou dans les festivals . Puis se mettre à beugler . Ce fût le 23 décembre 2023 qu'il passa à l'action . Il embarqua dans l'aventure deux complices pour faire des photos en grand angle .
Un happening qu'ils disent - il suffit de dire skate ou planche à roulettes , ça sonne pas pareil . Avec Ptit Louis et Fabrice ils préfèrent dire une intervention . C'est le même principe que les Femen . Ne pas faire compliqué - du basique . Les Femen ça ressemble aux communistes de 1917 et après , ça n'avait rien à voir les états des sociétés de l'ouest et de l'est - et pourtant bim-bam une frange de la population s'était entichée de ce mirage . Là ce n'est pas important le public réel , ce qui est important c'est la duplication en images . Dans les parcs d'attractions c'est toujours les montagnes russes qui raflent la mise .
Le seul risque ça peut-être les patrouilles de police , mais bon après des dizaines d'années de Vigipirate ils savent faire la part des choses . Depuis la provoc des surréalistes de descendre un boulevard en tirant sur la foule est devenue beaucoup moins drôle . Préparer le bardas , ne rien oublier .