mercredi 10 août 2022

Confire

 


 

 

 Deux érudits , deux frères , Jean et Lucien Lajonchère rendent hommage aux trésors de leur terre  et à leur père qui fût de l'aventure - en co-actionnaire d'une confiserie . Il y eut un âge d'or des confiseurs auvergnats ce fût le moment de rencontre  du thermalisme dans les villes de Chatel-Guyon , La Bourboule , Châteauneuf-les-Bains , Vichy , Royat et des productions locales . Avant son déclin avec la forte concurrence des fruits du sud , de la mode et de la démocratisation des conserves .

Des vergers à perte de vue du " roi des fruits " - l'abricot - et ce savoir faire tenu secret de sa transformation en pâte de fruit - dit uniquement de bouche  à oreille  . Mais avant tout le joyau était l'angélique . Ce vert qui donnait espoir immédiat au palais des gourmets et cette inimitable saveur herbacée . Il faut imaginer des champs où il était possible de circuler entre les pieds  - elle tutoie les 2m50 - le paysan était bercé au moindre souffle et protégé du soleil par  l'ombreuse  ombellifère . 

Son déclin annonça l'ère industrielle , les terres et les bras autour de Clermont-Ferrand allaient produire des pneus . Place aux routes bitumineuses et aux céréales . Il faut lire page 52 le constat des dévastations à venir -  " La Limagne , surtout aux alentours de Clermont , n'était donc pas , comme aujourd'hui un espace inhumain , sans arbres , bourré d'engrais , aux mains de quelques nouveaux seigneurs industriels agricoles , mais un endroit humide , le " marais " comme on l'appelait , où les cultures , arbres , betteraves , chanvre , angélique , faisaient vivre beaucoup de monde , et ce n'est pas sans raison que dans ce marais un village s'appelle Malintrat " la mauvaise entrée " en latin , car en venant de Lyon , ceux qui voulaient prendre la ligne droite Pont-du-Chateau-Clermont , pour aller plus vite , s'enlisaient dans ce lieu désormais asséché " 

L'angélique en témoin de cette modernité fût évincée . Le moindre arpent de terrain valorisé , drainé et asséché . Les arbres et les haies arrachés , les cours d'eau endigués , les mares comblées  pour ne pas perdre un mètre . Un ami me disait toujours si ils pouvaient ils sèmeraient les fossés . Le mouvement fût national ils le nommèrent remembrement ce fût la lupara bianca des campagnes . Il fallait que tout disparaisse y compris les insectes pour laisser place aux monocultures . Plus d'évaporation même le ciel est assoiffé . C'est peut-être cela qu'annonçait le grand reflux de ces polycultures - sous le soleil exactement -  le devenir confit des hommes