vendredi 21 juin 2024

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 C'est une fan absolue de mode 

Ce qu'elle préfère 

C'est quand je pose mes griffes sur ses rotondités

Vol libre , plume à la main

 


 

Des corps broyés innombrables  jonchant les champs de bataille . Sur cet humus souvent pousse la revanche . Il y a des peuples qui bifurquent , qui savent tirer les leçons des catastrophes . C'est l'intelligence de la Suisse , ce pays où coexistent  plusieurs langues  . C'est si rare d'échapper au centralisme ou que l'autre devienne le déversoir . Cela n'empêche pas de construire des abris anti-atomique , on sait jamais . C'est cela aussi une œuvre , un abri , un réceptacle - une tentative de témoignage - une plate-forme pour ceux qui viennent s'y poser . Dada ne pouvait naître qu'ici en regardant la folie des hommes et en élaborant une réponse à leur hauteur . Les artistes suisses essaiment ils partent chez leurs grands voisins , pour revenir parfois . Ces allers-retours pour mieux dire aux autres un grand bonjour à la suisse - Coucou !

Forger son langage ce qui se nomme style y ajouter de l'esthétique cela donne les livres d'artistes . Dans ce fort volume édité par Les Cahiers dessinés intitulé  justement Le Livre libre est exposé le meilleur de cet alliage produit en suisse romande . Les textes sont assez succincts mais les découvertes nombreuses - mon tout  est rangé par ordre chronologique . Chacun porte un univers , celui de Charles-Auguste Humbert et son Gargantua tout enluminé est d'une luxuriance rabelaisienne  . Gérard de Palézieux et ses paysages intérieurs et extérieurs telles des îles - il est le plus japonais des suisses et il y en a tant . Ils partagent de nombreuses similitudes . Robert Hainard et la justesse incarnée  dans ses bois gravés représentant les animaux qui en sont issus - Paul Jouve pas bien loin dans le décor . Animaux cachés derrière les Feuilles d'automne de Philippe Robert - en explosion de couleurs . Feuilles qui en s'écartant dévoilent les visions de Pietro Sarto . Léo Maillet et son graphisme d'angoisses , traqué puis réfugié en Suisse pour désigner tout cela il disait -  " On ne peut rien penser d'une telle histoire . L'Europe est trop bête " .Sans oublier les éditeurs passionnées que furent Henri-Louis Mermod , Fernand-André Parisod talentueux typographe , François-Louis Schmied et sa méticulosité , l'inévitable Albert Skira . Beaucoup de pépites désormais disponibles qu'à prix d'or sur des sites spécialisés . Elles mériteraient d'être rééditées pour trouver de nouveaux amateurs , pour que leurs beautés fassent pétiller à nouveau les regards

Les sensations , l'expérience du monde , transmutées dans un langage propre  - reconnaissable  . Cette tentative " artiste " d'être au plus proche de la retranscription . Il y a les défricheurs , les affineurs et les suiveurs - une nouvelle façon d'exprimer s'invente , fait école , certains s'en emparent avec talents puis des milliers l'ânonnent . Nombreux trouvent style puis ils s'y lovent - ils deviennent leur répétition . Encouragés par la difficulté à percer - il y a tellement de prétendants - qu'une fois arrivé ... Par les galeristes ou éditeurs qui ne souhaitent pas que leurs poulains désarçonnent le public laborieusement conquit ou tout simplement que c'est la seule corde à leur arc . Ils sont dans le monolinguisme .  Ce qui fait le charme et la force du livre d'artiste - même si il y a dans le lot beaucoup d'inaboutissements  - c'est la prouesse du bilinguisme - illustration et écrit - alors que la majorité n'en baragouine qu'une .   Les polyglottes si rares .  Pays de frontières - de lisières - la Suisse peut s'enorgueillir d'en accueillir  - ils volent des morceaux d'étoiles pour les glisser dans les pages de leurs livres - ils  forment  diadèmes .