Il faut bien quatre mains , celles de Anne Alombert et Gaël Giraud pour écrire ce livre - Le capital que je ne suis pas ! Tant le programme est vaste on y trouvera de la valeur travail , de la répartition du capital , du numérique et son bras armé l'IA , un projet de revenu universel , une nouvelle répartition du temps de travail , la place des communs et j'en passe . C'est un livre tentant d'ébaucher une théorie et des réponses à hauteur des défis que pose le souverain capital . Jamais la masse de capitaux cherchant à s'investir n'a été si importante - des milliards et des milliards . Alors Que faire ? demandait déjà Tchernychevski . La création d'une couche supplémentaire au réel celle du virtuel fût salvatrice . Tout l'argent s'est engouffré dedans avec pour but de dématérialiser la société toute entière - de siphonner sa substance à leur profit . Le capital aime les immeubles et les pyramides et surtout les multinationales - toutes ces accumulations qui ne font rien germer sur des terres rendues stériles . Au milieu de ces déserts ces fameuses pyramides d'argent en tombeaux pour escamoter les corps - comme le remarque si justement Alombert et Giraud . Tout autour se danse la gigue des nouveaux tycoons , d'ailleurs c'est assez amusant à quel point ils ont l'air d'être empruntés - avec des dégaines totalement improbables , au même niveau que les créateurs de haute-couture c'est dire . D'ailleurs cette création d'univers qu'ils tentent d'imposer , il est aussi possible de l'envisager sous un tout autre angle - peut-être est-ce tout simplement l'imaginaire - à hauteur de - qui trouve enfin un terrain de jeu pour se déployer et être le vainqueur du moment . Il se dit tellement de choses
L'IA quésaco ? C'est peut-être avant tout une promesse - une promesse technologique . Elle est tissée de l'étoffe des rêves de tout un chacun . Qui ne veut pas de promesses ? A partir du moment où une bonne part du réel passe par le rapport à des écrans portatifs elle en incarne le devenir . Le rêve de l'agroalimentaire des années 70 aux prémisses de son développement était que les hommes ne se nourrissent plus que de pilules . Celui de la Silicon Valley est de ne plus les nourrir que d'images . La tentative d'élaborer des casques ou des lunettes pour y baigner en permanence et leur kif absolu - c'est le Graal . Ce n'est plus la Bible ou le Coran en poche mais des écrans . Ce que propose l'IA à tous ses adeptes - en dehors de ses multiples applications gadgets en petits pains - c'est la tentative de leur créer un dieu . Et ça c'est un sacré programme informatique !
Chercher une avant-garde , où son-elles ? Bien sur qu'il y en a mais elles sont discrètes et il faut bien les chercher . La seule visible et omniprésente - c'est l'avant-garde du capital . Elle sculpte les masses et définie les orientations . Elle dit - Abandonnez-vous ! C'est la petite musique de tout automatisme - Laissez nous faire à votre place , cela vous évitera des efforts inutiles et nous savons mieux le faire que vous . C'est le désir du plus grand nombre qui prend forme insidieusement . De biens pauvres choses la majorité du temps mais qui deviennent incontournables . Il y a les fervents adeptes , les suiveurs et les innombrables idiots-utiles - cela fait du monde , beaucoup . C'est peut-être là le bémol à apporter aux fines analyses de Alombert et Giraud en plus de quelques désaccords d'analyses structurelles que je ne vais pas exposer dans cette mince chronique . Par exemple cette incompréhension récurrente des clercs pour le goût des divertissements . Si une minorité écoute ou regarde France Culture , Arte ou d'autres cela ne va pas changer d'un coup de baguette magique algorithmique avec l'arrivée des écrans portatifs dans la poche de tous . Ce n'est pas une question d'offre c'est uniquement que le quantitatif l'emporte toujours sur le qualitatif . C'est le même mouvement que celui de l'arrivée des radio-libres puis de leur quasi disparition . Les têtes bien faites et pensantes n'arrivent souvent pas à concevoir la fragmentation et qu'elles ne sont que partie . Retrouver dans le numérique les mêmes recettes que la presse à grand tirage du XIXe ou que la télévision - ce n'est pas étonnant . Le support s'est modifié uniquement - les autoroutes toujours à fond . Le divertissement ne passant plus que par le rétinien suite à un affadissement programmé du réel et les cultures considérées en artefacts ne reste plus que de l'interchangeable ce qui est à la fois le rêve du capital et d'une grande partie de l'idéologie de " gauche" - celle d'une totale équivalence . Ça tombe bien et mal car quand il n'y a plus rien entre les individus , il ne reste alors qu'une seule substance la matière noire de l'économie . Maille après maille ils souhaitent tout terminer de détricoter et annihiler le moindre esprit collectif - la seule façon de résister semble t-il est de ne pas jouer le même jeu , ni à la même table . Je vous souhaite de bonnes lectures